Les derniers jours ont été riches en actualités. Du sommet de Bruxelles au sommet de Durban, nombre de décisions ont été prises (ou ne l’ont malheureusement pas été) qui auront un impact sur la crise des dettes souveraines et sa contagion à l’économie réelle comme sur celle du réchauffement climatique. Et dans les deux cas, c’est l’urgence de l’action qui semble avoir été oubliée. Prenons le cas des résultats du sommet de Bruxelles. Qu’une révision des Traités européens pour introduire de la gouvernance budgétaire intervienne dans les prochains mois est en soi souhaitable – et je l’avais écrit il y a plusieurs mois sur ce blog – mais cela ne peut se faire sur la base d’une seule logique de sanctions à l’égard d’Etats défaillants sans prendre en compte l’urgence des semaines à venir. Il n’est pas nécessaire en effet de modifier les Traités actuels pour doter le FESF à hauteur des risques auxquels il sera vraisemblablement amené à faire face. Pas plus qu’il n’est nécessaire non plus de les modifier pour pousser à une intervention décisive de la BCE face à la spéculation.
Tout se passe comme si Nicolas Sarkozy et Angela Merkel avaient exclu le temps court au bénéfice du temps long. La relance de la croissance ne pourra pas attendre une procédure de négociation longue et sujette à des rythmes de ratification nationaux différents d’un Etat à l’autre. C’est en cette fin d’année et au début de l’année prochaine que se joue la réponse à une crise qui menace l’activité économique de l’Union européenne et, partant de là, la cohésion sociale. A trop tergiverser, à trop renvoyer à plus tard les décisions difficiles, c’est au chômage que l’on condamne des centaines de milliers d’Européens de plus à mesure que passent les mois. C’est aussi pour cela que l’introduction au forceps d’une règle d’or dans les Constitutions nationales n’a pas grand sens. La voix d’un Etat en Europe n’a-t-elle aujourd’hui de crédit que lorsqu’elle est garantie par une révision constitutionnelle, longue et périlleuse ? Rien n’interdit, comme le propose François Hollande, d’y préférer une loi de programmation des finances publiques qui fixe précisément le cap, année après année, de la rigueur budgétaire à tenir pour parvenir en 2017 à l’équilibre des comptes publics.
A Durban, un accord auquel plus grand monde ne croyait est intervenu tout en bout de course. Mieux vaut certes se séparer de cette manière que dans le chaos d’un échec fracassant, mais y a-t-il réellement eu progrès pour la banquise qui fond, les migrations climatiques et le risque pour l’économie mondiale d’un réchauffement non-maîtrisé de la planète ? Il a été décidé de prolonger le Protocole de Kyoto sans en spécifier la durée. Les premières mesures contraignantes n’interviendront qu’en 2020 au plus tôt. Et rien n’a été prévu sur le financement du fonds climatique vert décidé à Copenhague il y a déjà deux ans. De sorte que cet accord a minima renvoie à une autre négociation, sans s’atteler à l’urgence climatique qui ravage le monde et affecte l’économie. Et c’est là que ces deux sommets de fin de semaine se rejoignent dans leurs limites : l’imminence du péril est insuffisamment prise en compte et les réserves de croissance verte ne sont pas mobilisées. Comme si l’environnement restait, envers et contre tout, une préoccupation pour temps économiques heureux seulement.
Le temps long ne doit pas exclure le temps court. Surtout s’il faut faire assaut de courage politique. Quant à l’économie, contrairement à ce qu’assure Nicolas Sarkozy, qui a tout renié du Grenelle de l’Environnement, c’est en faisant le choix d’activités durables et bénéfiques pour notre planète qu’elle pourra rebondir. C’est dans les métiers de la propreté, de l’eau, des énergies propres, parmi d’autres exemples, que l’on trouvera des réserves insoupçonnées de croissance. C’est là que sont les emplois. De ce point de vue, certains pays d’Europe ont des leçons à nous donner, notamment l’Allemagne, qui a réduit de 27% ses émissions de gaz à effets de serre entre 1990 et 2009, créant des centaines de milliers d’emplois à cette fin, quand la France plafonnait à 7,7%.
Puisse la convergence revendiquée par Nicolas Sarkozy ne pas faire opportunément abstraction de cet écart-là. Car il mesure l’étendue de l’échec de la politique conduite par la droite française ces dix dernières années.
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