Deux semaines après le Sommet européen du 21 juillet, quelques jours à peine après l’accord entre les démocrates et les républicains aux Etats-Unis, la crise sur les marchés financiers repart de plus belle. A l’évidence, l’interrogation sur le traitement des dettes souveraines au sein de la zone Euro demeure et le plan de sauvetage de la Grèce bien imprudemment présenté par les leaders européens comme la résolution définitive de la crise n’a pas convaincu. Les nouvelles cibles des fonds spéculatifs, qui alimentent cette volatilité des marchés pour s’enrichir, sont désormais l’Italie et l’Espagne, deux poids lourds au sein de la zone Euro.
Que valent les décisions arrêtées in extremis par les Chefs d’Etat et de gouvernement le 21 juillet face à une attaque portant cette fois sur deux pays représentant 30% de la zone Euro ? Malheureusement pas grand-chose. La zone Euro n’a tout simplement pas les moyens de voler de la même manière au secours de l’Italie et de l’Espagne. Ces derniers jours, le rachat sur le marché secondaire d’obligations d’Etats en difficulté par la BCE et la mise à disposition des banques de nouvelles liquidités n’ont eu aucun effet. Les taux des emprunts italiens et espagnols dépassent désormais les 6% contre moins de 2,5% pour les emprunts allemands.
Depuis bientôt deux ans, les Chefs d’Etat et de gouvernement donnent prise, par leurs désaccords publics, manque de convictions européennes et petits calculs nationaux, aux forces spéculatives qui veulent faire voler en éclats la zone Euro. Ils courent derrière les évènements et se gardent de les anticiper. Non que cette anticipation soit impossible, mais ce serait au prix d’un renoncement jugé trop coûteux aux dogmes pourtant dépassés sur lesquels l’Euro a été construit. On préfère ainsi remettre un peu plus de sous sur la table à chaque nouvelle alerte en échange d’un engagement d’austérité conduisant à la paupérisation de millions de personnes. Or, sans croissance, il est vain d’espérer combler la dette publique…
Le retour à une monnaie nationale dans les pays aujourd’hui en difficulté n’est pas la solution. La dépréciation de cette nouvelle devise dépasserait très largement le rétablissement de compétitivité qui pourrait en soi être attendu. La valeur de l’épargne serait menacée par la conversion des dettes et créances aujourd’hui libellées en Euros. Avant même l’introduction de la nouvelle monnaie, la ruée paniquée des épargnants vers les banques provoquerait leur effondrement avec de terribles conséquences pour l’économie nationale. A l’arrivée, le coût pour l’Union européenne d’un tel scénario serait plus lourd que celui d’une solution au sein de la zone Euro.
Cette solution est celle de la mutualisation des risques. Il s’agirait de communautariser la dette par des emprunts obligataires européens qu’émettrait une agence de la dette. Ce sont les eurobonds. Ce serait un saut fédéraliste majeur, qui n’appartient pas aux dogmes d’origine et ne suscite pas de passions éperdues auprès de certains Chefs d’Etat et de gouvernement, notamment Angela Merkel. Il serait pourtant à même de remédier à la fragilité actuelle de la zone Euro et aux limites des solutions dégagées à ce jour, rappelant aussi que la communauté de destins qui fonde l’Union ne peut être une vaine expression sans contenu.
Ce choix fédéraliste est celui de la solidarité financière entre Etats contre celui de la concurrence entre taux d’intérêt. Il est à l’avantage des Etats menacés bien sûr, qui pourraient emprunter sur les marchés à des conditions enfin acceptables, mais aussi des Etats plus vertueux, dont le marché unique absorbe une bonne part des exportations. Associé au gouvernement économique que la réalité des mois passés impose, un tel choix permettrait de travailler au rétablissement concerté de l’équilibre des finances publiques des pays de la zone Euro, sans sacrifier la croissance ni exposer les peuples à une souffrance sociale intolérable. Puisse l’été de tous les dangers que nous traversons conduire à privilégier ce choix européen-là.
Laisser un commentaire