En compagnie d’Elisabeth Guigou, Présidente de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, et de mon collègue député UMP du Val d’Oise Axel Poniatowski, je me suis rendu à New York du 20 au 22 novembre pour une série de réunions dans le cadre de la 68ème Assemblée Générale des Nations Unies. Outre l’Ambassadeur Gérard Araud, Représentant permanent de la France auprès des Nations Unies, et ses principaux collaborateurs, nous avons rencontré les Ambassadeurs des Etats-Unis, de Russie, d’Israël, de Palestine, de Côte d’Ivoire, du Tchad, du Burkina Faso, du Cameroun, du Congo-Brazzaville, de la République Démocratique du Congo et de l’Union africaine. Nous avons visité également le Vice Secrétaire Général des Nations Unies Jan Elliasson, le Secrétaire Général Adjoint chargé des opérations de maintien de la paix Hervé Ladsous et le Sous-Secrétaire Général aux affaires politiques Oscar Fernandez Taranco. A notre agenda figurait aussi un dîner de travail sur l’Iran en compagnie de chercheurs, politologues et journalistes, un déjeuner sur le même format consacré aux Etats-Unis ainsi qu’une réunion sur la République Centrafricaine avec Philippe Bolopion, Directeur des Nations Unies à l’ONG Human Rights Watch.
La situation en Syrie a été au centre de la plupart de nos entretiens. Il s’agit de la pire tragédie humanitaire depuis le Rwanda il y a près de 20 ans. Plus de 110 000 morts sont déjà dénombrés. Le soutien indéfectible de la Russie et de la Chine au régime de Bachar Al-Assad (3 vétos…) rend malheureusement impossible à ce stade toute résolution permettant l’organisation de corridors humanitaires alors même que les combats redoublent de violence, que l’hiver approche et que les réfugiés se comptent par millions. Le régime, appuyé par l’Iran, tient et a repris l’offensive face à une opposition fragmentée. Il est urgent de réunir la conférence de Genève II pour trouver une solution politique qui conduise à la mise en place d’un gouvernement de transition dotés des pleins pouvoirs exécutifs, y compris ceux de la présidence. A ce titre, nous devons soutenir la Coalition nationale syrienne, représentant l’opposition modérée. La lutte contre l’impunité doit plus que jamais rester une priorité avec la saisine de la justice pénale internationale pour déterminer les responsabilités du régime et de Bachar Al-Assad dans le massacre à l’arme chimique du 21 août.
Le drame syrien met en lumière le jeu dangereux qu’a joué par l’Iran au Moyen-Orient ces dernières années. Les discussions de Genève sur le nucléaire iranien sont critiques. L’Iran n’est plus très loin en effet de disposer des éléments lui permettant de se doter de l’arme nucléaire. C’est sans doute tout au plus une question de mois. A tous nos interlocuteurs, nous avons rappelé la position française : l’Iran peut disposer de l’énergie nucléaire à des fins civiles si tel est son choix, mais nous ne saurons accepter que ce pays se dote de la bombe atomique. Il en va de la sécurité d’Israël et plus largement de celle tous les Etats du Moyen-Orient. En retour d’un engagement ferme et vérifiable de l’Iran de renoncer à tout programme nucléaire militaire, couvrant la question de l’enrichissement de l’uranium à long terme, la gestion des stocks existants d’uranium enrichi à 20% et le réacteur d’Arak, il devra y avoir une levée des sanctions ou à tout le moins leur réduction significative. Le but est d’obtenir un apaisement des relations de l’Iran avec ses voisins et avec la communauté internationale. Les déclarations encourageantes du Président Rohani militent en ce sens.
Le processus de paix au Proche-Orient a bien sûr été au cœur de nos échanges avec les représentants permanents d’Israël et de la Palestine, mais aussi avec l’Ambassadrice américaine Samantha Power. La reprise des négociations entre Israéliens et Palestiniens à la fin du mois de juillet est un développement à saluer. Quelles sont cependant les marges de manœuvre réelles si l’installation de nouvelles colonies israéliennes dans les territoires occupés se poursuit à l’initiative du Premier Ministre Benyamin Netanyahou ? La situation de la population dans la bande de Gaza est dramatique. Le développement économique des territoires palestiniens est urgent et requiert la levée immédiate des restrictions israéliennes. Nous nous sommes félicités du succès de la visite d’Etat du Président Hollande en Israël cette semaine, à laquelle avait participé Elisabeth Guigou. Le Président a rappelé devant la Knesset l’attachement indéfectible de la France à la sécurité d’Israël et son soutien à la création d’un Etat palestinien pleinement souverain. L’accord entre Israéliens et Palestiniens devra se faire sur les lignes de 1967 avec des échanges de territoires mutuellement agréés entre les parties.
La situation en République centrafricaine suscite une grande inquiétude. L’Etat a disparu et les rebelles de la Séléka ont pris le pouvoir, faisant régner la terreur dans le pays. Les populations fuient et le risque de conflit religieux est désormais bien réel. J’ai été très impressionné par le témoignage de Philippe Bolopion, qui revenait de Bangui. La Séléka tue les civils, viole femmes et filles, vole et pille. Hôpitaux et écoles ferment leurs portes. Un désastre est en cours, que l’on peut qualifier de situation pré-génocidaire. La France se mobilise aux côtés de l’Union africaine. Une force africaine (MISCA) est en cours de déploiement sur place et le partenariat des Nations Unies avec celle-ci a été acté à l’unanimité au Conseil de Sécurité le 10 octobre dernier. Il faut donner un mandat robuste à la MISCA et déterminer le soutien opérationnel et financier à lui accorder. Reste que c’est à terme d’une opération de maintien de la paix dont il devrait être question pour tenir l’objectif de la déclaration de N’Djamena et de la Charte de transition d’organiser des élections 18 mois après le début de la transition.
Le drame centrafricain éclipse quelque peu les avancées réelles au Mali, en République Démocratique du Congo et en Côte d’Ivoire. Au Mali, la résolution 2100 du Conseil de Sécurité a permis à la France, après la phase active de l’opération Serval, de passer efficacement la main aux Nations Unies. La réussite de l’organisation des élections souligne la qualité du travail effectué. En République Démocratique du Congo, la force de maintien de la paix (MONUSCO) a été renforcée par une brigade d’intervention de 3 000 soldats supplémentaires, décisive dans la lutte contre les exactions du M23. Le processus politique régional conduit par l’ancienne Présidente irlandaise Mary Robinson a été lancé avec de solides espoirs. La difficulté reste néanmoins l’absence d’Etat à l’est du Congo et l’insécurité qui en résulte. En Côte d’Ivoire, le travail de la force de maintien de la paix (ONUCI) porte ses fruits. Le développement économique du pays (9% de croissance) et l’action du Président Ouattara pour la réconciliation contribuent également aux progrès unanimement relevés par la communauté internationale.
Il est difficile en deux journées intenses de faire le point sur tous les sujets brûlants affectant le monde. Je pense notamment aux négociations climatiques et à l’échec de la COP 19 de Varsovie. Dans un peu plus d’un an, après la COP 20 de Lima, ce sera à la France avec la COP 21 en février 2015 au Bourget de jouer un rôle espérons-le décisif à la recherche d’une solution qui ne pourra reposer sur la seule juxtaposition de bonnes pratiques, mais sur des mécanismes contraignants de limitation des émissions de gaz à effets de serre et des règles précises de financement de l’effort international à déployer. Le changement climatique sera au centre de la prochaine Assemblée Générale en septembre 2014 et figurera de manière déterminante dans le nouvel agenda du développement durable « post-2015 », dont l’objectif sera de donner suite aux objectifs du millénaire pour le développement définis en 2000. Dans ce cadre, aux côtés de l’action gouvernementale, la diplomatie parlementaire que j’ai eu le privilège de vivre et pratiquer durant ces deux jours à New York aura un rôle déterminant à jouer pour un multilatéralisme efficace et solidaire.
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