Nicolas Sarkozy, ses Ministres les plus zélés et l’excellent Jean-François Copé nous l’assurent: François Hollande serait devenu insupportablement arrogant. Et le Parti Socialiste avec.
Traduisons : défendre ses propositions, travailler à un autre avenir que celui que nous prépare la droite, croire en ses chances, en un mot se battre pour gagner, c’est de l’arrogance. Sans doute faudra-t-il bientôt s’excuser d’avoir des idées différentes et un regard critique sur le mandat qui s’achève. Triste vision du débat politique que celle-là ! Changer de politique, de Président et de majorité parlementaire, c’est le jeu même de la démocratie. Et c’est notre objectif au printemps prochain. Malgré les conversations urbi et orbi du dimanche soir, quand toutes les chaînes de TV en France sont sommées toute séance tenante de diffuser la parole présidentielle sur les écrans…
En 2007, Nicolas Sarkozy s’était fait élire sur le pouvoir d’achat et la fable du « travailler plus pour gagner plus ». Cinq années et beaucoup de désillusions plus tard, il est celui qui l’enterre. Il a ainsi été annoncé dimanche soir qu’un « accord de compétitivité » autoriserait désormais le patron d’une entreprise en difficulté à imposer une baisse de salaire (et éventuellement du temps de travail aussi) aux salariés ou une hausse du temps de travail sans augmentation concomitante du salaire. Où va le droit du travail ! Comme la défiscalisation des heures supplémentaires n’a pas été supprimée, une société pourrait même conserver les exonérations de cotisations sociales en forçant ses salariés à faire des heures supplémentaires à des salaires réduits ! Tout cela est affligeant et révélateur.
Face à l’augmentation du chômage dont elle porte une bonne part de la responsabilité en raison de sa politique de cadeaux fiscaux improductifs depuis 2007, la droite n’a de réponse que dans la réduction des droits et des salaires. C’est l’institutionnalisation de la précarité et de la misère sociale. Comme si, en creux, il fallait lire que les salariés sont les premiers fautifs dans leur infortune. Qui peut croire qu’une louche de TVA en plus, même rebaptisée « sociale », ne se traduira pas par une hausse des prix à la consommation ? C’est exactement ce que conclut le rapport tant vanté par la droite de la Cour des Comptes sur la fiscalité entre la France et l’Allemagne. Une grande partie de l’augmentation de TVA en Allemagne à compter de 2007 avait été répercutée sur les prix.
Angela Merkel viendra faire la campagne de Nicolas Sarkozy en France. Elle lui a même souhaité son anniversaire au raout de l’UMP samedi dernier. C’est la stratégie de la droite européenne. Doit-on en France embrasser le modèle allemand ? Non. L’Allemagne a, c’est vrai, une économie très dynamique, mais aussi injuste. Peut-on, doit-on se satisfaire que la précarité soit la réponse au chômage ? Et que la consommation soit le parent pauvre de la croissance ? Mettre l’économie et la société en mouvement, c’est demander avant tout à ceux qui ont beaucoup de contribuer. C’est aussi refuser de sacrifier davantage le travail au détriment du capital. Quel avenir prépare-t-on lorsque des générations voient leurs plus belles années sacrifiées par la précarité ?
J’avais été bouleversé par la lecture il y a quelques mois du livre-reportage de Florence Aubenas sur la réalité sociale dans les entreprises de nettoyage du Calvados. Cet ouvrage s’appelle « Le Quai de Ouistreham ». J’en recommande la lecture. C’est une plongée édifiante dans le monde de la relégation sociale, de la souffrance ignorée et de l’avenir perdu. Cette réalité-là est insupportable et intolérable. Elle appelle toutes les indignations. Alors oui aux prélèvements supplémentaires pour désendetter notre pays, oui à la suppression de 29 milliards d’Euros de niches fiscales pour relancer l’économie, oui au doublement du plafond du livret A pour financer le logement social, oui au contrat de génération pour relancer l’emploi, oui à la création de 60 000 postes d’enseignants sur 5 ans !
Et mille fois oui au retour de l’action publique, de l’Etat stratège, de l’Etat impartial, du service public en France et chez nous, dans les communautés françaises de l’étranger. Il y a tant à faire, loin de toute arrogance. Il y a au contraire à imaginer, à convaincre, à construire et nous nous y employons.
crédit photo : E. FEFERBERG/AFP
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