Je me suis rendu au Monténégro en ce début de semaine pour une visite de deux jours, première étape d’un périple d’une semaine dans les Balkans occidentaux qui me mènera au Kosovo, puis en Macédoine. Le Monténégro est indépendant depuis 8 ans. 135 compatriotes vivent dans le pays, grand comme deux départements français, qui compte un peu plus de 600 000 habitants. 1,3 million de touristes, parmi lesquels 37 000 Français, l’ont visité l’an passé. Le Monténégro a reçu le statut d’Etat candidat à l’adhésion à l’Union européenne en 2012. Cette perspective est clairement la clé de son développement économique, qui repose sur le tourisme, mais aussi sur un potentiel industriel et notamment énergétique à valoriser, qui devrait lui permettre de trouver à terme toute sa place dans la région et en Europe.
Le Monténégro utilise l’Euro comme monnaie depuis l’entrée en vigueur de la monnaie unique, choix fait à l’origine sans l’aval des autorités européennes et régularisé depuis lors. Si ce choix lui a permis de maintenir avantageusement les prix sous contrôle, il n’a cependant pas épargné au pays les conséquences de la crise économique et financière de 2009. L’endettement est la difficulté principale du Monténégro. Le taux de chômage, en recul grâce à une croissance de 2,6% en 2013, reste élevé, aux alentours de 15%. La faillite du combinat d’aluminium de Podgorica (KAP) fait peser une lourde incertitude sur l’avenir de cette industrie, importante pour la balance des paiements monténégrine, de plus en plus dépendante du seul tourisme.
La France, comme une quinzaine d’autres pays, a ouvert à l’indépendance du Monténégro une Ambassade à Podgorica. L’ambition de la France est de soutenir le processus d’intégration du Monténégro dans l’Union européenne. Notre pays appuie via divers projets le renforcement des capacités administratives monténégrines et la formation des cadres gouvernementaux à la langue française. Le Monténégro a adhéré en qualité d’observateur à l’Organisation Internationale de Francophonie en 2011. Un club d’affaires franco-monténégrin, que j’ai rencontré à Podgorica, a été fondé il y a 2 ans. La Société Générale, Renault et Schneider y sont notamment représentés. Une convention le lie très utilement à Ubifrance.
Pour percer économiquement au Monténégro, il faut s’y installer, rencontrer les gens, acquérir les codes. C’est la valeur ajoutée du club d’affaires. Aujourd’hui, les sociétés françaises opèrent trop souvent au Monténégro via des distributeurs. Sans doute la taille modeste du pays en est-elle l’une des causes. Il n’en reste pas moins que le marché monténégrin repose non seulement sur le nombre d’habitants, mais aussi de 1.3 million de touristes, ce qui change pour une large part la donne commerciale. Les Turcs, les Qataris, les Allemands et les Italiens sont, entre autres, bien présents. Nous devons l’être aussi, notamment pour les opportunités à venir sur le tourisme (privatisations d’hôtels, tourisme vert et de montagne), les chemins de fer, l’énergie (hydroélectricité, solaire, biomasse) et les travaux publics.
La France doit prendre sa part dans le développement économique du Monténégro. Dans le domaine du tourisme par exemple, notre pays gagnerait à former les jeunes Monténégrins à son savoir-faire hôtelier. Et peut-être aussi à imaginer un soutien sous forme de conseils à la création de pépinières d’entreprises. Dans ce cadre, l’apprentissage du français est à l’évidence un enjeu politique majeur. J’ai visité l’Institut français de Podgorica en compagnie de son directeur, Stéphane Maicon, et rencontré Milica Scepanovic, représentante de l’Association des Professeurs de Français du Monténégro. Cette association se bat, avec le soutien de l’Institut, pour maintenir le nombre d’apprenants dans les écoles et collèges. Les professeurs de français sont présents dans les journées de la francophonie et le festival de théâtre.
L’Institut français a enregistré l’an passé 620 inscriptions. Avec des moyens limités et dans le cadre de cofinancements, il agit auprès des autorités monténégrines pour maintenir ou réintroduire le français dans les établissements. Il y a beaucoup à faire. Ainsi, alors que les Français forment le premier contingent de touristes de l’Europe occidentale, notre langue a disparu de l’enseignement de la faculté de tourisme de Kotor. La France accorde des bourses de second cycle permettant à des étudiants monténégrins de poursuivre leur cursus dans notre pays. Face aux Allemands, qui disposent de plusieurs lecteurs au Monténégro, nous n’en avons plus qu’un, opérant dans le nord, là où le français se maintient. Un autre serait nécessaire dans le sud, sur la côte, là où se trouve la majorité de la population. Il faudrait aussi répondre de France à la demande d’échanges scolaires de plusieurs établissements monténégrins.
L’apprentissage du français requiert également une solution scolaire et pré-scolaire pour les familles intéressées. Cela peut passer par l’intégration du français dans certaines crèches et garderies. J’ai rencontré Julie Heam, la présidente de l’association « Les Petits Princes ». L’association a vocation à aider à créer une structure scolaire française au Monténégro. A ce stade, dans le cadre d’un suivi CNED, elle offre les services de 3 répétiteurs à 15 enfants des classes maternelles au collège et est hébergée dans une école monténégrine. Pour créer formellement une école française, il faudrait atteindre à tout le moins une taille critique (entre 30 et 40 élèves) et surtout s’adosser à une école existante, comme c’est le cas à Tirana. Ou peut-être imaginer un mini-campus franco-italo-allemand, inspiré de l’Eurocampus de Zagreb.
La question scolaire mobilise l’Ambassadrice Véronique Brumeaux et ses collaborateurs car elle est une condition essentielle du renforcement de la présence française au Monténégro. Madame Brumeaux m’a également présenté le travail réalisé par l’Ambassade de France sur le dispositif de sécurité pour nos compatriotes, prenant en compte les risques incendie (feux de brousse en été), sismiques (le Monténégro est situé sur une faille active et a connu un tremblement de terre de 7 sur l’échelle de Richter en 1979), accidents de la circulation (transports collectifs), navigation et climatiques (précipitations). Le plan de sécurité est en place, les îlots sont tracés et les moyens matériels en cas de crise sont opérationnels, tant pour les liaisons satellitaires que pour les stocks de nourriture et d’eau.
Je tiens à saluer le travail d’information et de rassemblement de la communauté française mené par l’Ambassade. Si les inscriptions au registre des Français de l’étranger progressent régulièrement au Monténégro, c’est grâce aux informations données et aux réunions organisées par Madame Brumeaux et ses collaborateurs. C’est ainsi que j’ai pu rencontrer plus de 20 compatriotes dans la ville côtière de Bar, leur présenter mon rôle et mes activités de député, et répondre à toutes leurs questions. J’y ai découvert des femmes et hommes aux parcours passionnants, notamment dans les domaines de l’hôtellerie, de la restauration ou de l’immobilier. Ce lien avec et entre les Français est éminemment précieux, en particulier dans les pays où notre communauté, de taille modeste, est dispersée.
J’ai achevé mon séjour par une réunion à l’Ambassade de France avec 3 députés monténégrins, de la majorité et de l’opposition, membres comme moi de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe : Pedrag Sekulic (ancien Ministre de l’environnement), Draginja Vuksanovic, et Mladen Bojanic. Nous avons évoqué la perspective d’adhésion du Monténégro à l’Union européenne et les progrès à effectuer à cette fin en matière d’Etat de droit, en particulier l’élection à venir du Procureur Général. Une part de notre échange a couvert également le développement des énergies renouvelables. Je retrouverai ces collègues et toute la délégation monténégrine à la session de l’Assemblée parlementaire à Strasbourg les 23-27 juin prochains.
Je remercie très sincèrement l’Ambassadrice Véronique Brumeaux et toute son équipe pour la gentillesse de leur accueil et le soutien apporté à la préparation de mon voyage.
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