Dans quelques jours auront lieu les élections régionales et cantonales. La campagne avance. Passionne-t-elle, mobilise-t-elle ? Rien n’est moins sûr. Déjà, certains commentateurs affutent leurs arguments pour les plateaux de télévision dimanche prochain : l’abstention sera nécessairement forte et il s’agira, comme d’habitude, de la déplorer, en y ajoutant les quelques trémolos qu’il faut pour justifier sa présence sur les dits plateaux. Tout cela n’est pas joyeux et sent allègrement le réchauffé. Des soirées électorales tristounettes et sans ressort, on en a connu. Est-ce que les Français s’en fichent vraiment des élections et de leur devoir civique ? On ne le saura que dimanche à 20 heures, lorsque fermeront les bureaux de vote. Tirer les conclusions d’un évènement avant même qu’il ait eu lieu est hasardeux. Une chose est sûre cependant : le débat politique français est sinistre et passe totalement à côté des enjeux des deux scrutins. La vacuité des idées est affolante. Il n’est question que de postures, de divisions, de calculs abscons et d’obsession présidentielle. Le tout sur fond de haine et de violence libérée, alimentée par quelques « youtubeurs » frappadingues et divers autres « contributeurs » en forme olympique, courageusement planqués derrière des pseudonymes sur les réseaux sociaux.
C’est à pleurer. On nous dira que c’est l’époque, que les gens ont tant souffert depuis mars 2020 que l’envie de vivre est plus forte, que c’est le printemps et même bientôt l’été et qu’en plus il y a l’Euro de foot. C’est juste en effet, à part que cela n’empêche pas non plus d’aller voter. Il n’y a aucune fatalité à ce que l’on s’abstienne et que le débat politique soit moche. Il faut pour cela vouloir élever le niveau, parler de ces élections plutôt que de celle d’après, ne pas céder à la confusion ambiante et encore moins y contribuer par des propos hors sujet. Nous traversons une crise économique et sociale gravissime, liée à une pandémie meurtrière, la pire depuis un siècle. Et quelles sont les responsabilités des régions et départements ? L’économie, l’aménagement du territoire et la formation pour les unes, le social pour les autres. C’est dire combien ces collectivités seront centrales dans la reconstruction à mener pour l’après-Covid. Or, tous les projets et propositions sur ces fronts ne se valent pas. Il y a des différences, des perspectives alternatives conséquentes entre les listes qui se présentent à nos suffrages. C’est de cela dont il faut parler : l’emploi, le modèle économique et le développement durable, pas les questions identitaires sur lesquelles les régions n’ont aucune prise ni compétence.
Français à l’étranger, sans doute ai-je le regard spontanément tourné vers les débats et rendez-vous électoraux des pays amis et partenaires. Je ne vois nulle part ailleurs la même atmosphère délétère, mais aussi le même atavisme et la même résignation qu’en France. L’idée que « c’est comme cela » et qu’on n’y pourrait rien, elle est chez nous seulement et elle me consterne. Il est temps d’en prendre conscience au-delà des microcosmes partisans et du boulevard périphérique de Paris. Lorsqu’en France, face à la difficulté d’organisation des élections en temps de pandémie, la réaction immédiate est de les repousser, elle est au contraire ailleurs d’amender les règles de droit électoral pour encourager la participation. Cela dit tout. En mars dernier, les élections aux Pays-Bas ont vu la plus large participation électorale. Ce fut le cas en mai aussi pour les élections au parlement régional de Madrid. Pourquoi ce qui est possible là-bas ne le serait pas chez nous ? Pourquoi ériger en totem notre droit électoral et chercher toutes les raisons possibles de rejeter le vote anticipé, utilement pratiqué dans d’autres pays ? Il faut vouloir oser, arrêter de calculer et de jouer petit bras tant est grand le risque d’envoyer la démocratie au fossé en vivant avec les peurs ou en les alimentant.
Il faut voter. La citoyenneté n’est pas faite que de droits, elle est aussi faite de devoirs et voter est un devoir civique. Quel est le sens de se plaindre de tout et de ne pas voter ? Je suis choqué d’entendre des gens affirmer ne pas voter parce que cela ne leur apporterait rien à eux, individuellement. Cet utilitarisme est une déconstruction affligeante du civisme. C’est une honte au regard de l’histoire de notre pays, de ses combats et de ses épreuves. Nous ne sommes pas une collection d’individus, pour certains altruistes (heureusement) et pour d’autres égoïstes (tristement). Nous sommes un peuple, une nation, un pays face à son destin. La citation est connue et elle concernait une autre histoire que la nôtre, mais ce qu’affirmait le Président John F. Kennedy dans son discours inaugural à Washington en janvier 1961 est plutôt universel : « (…) Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ». Je revois ma grand-mère aller voter jusqu’au soir de sa vie, fière et consciente de son devoir. Je la revois aussi, lorsque ses pas ne la portaient plus jusqu’au bureau de vote, remplir dûment sa procuration pour que sa voix soit exprimée, parce qu’elle y tenait plus que tout. Ce souvenir m’a marqué à jamais comme petit-fils et citoyen.
Ce n’est pas être un vieux con, porté par la nostalgie ou la mémoire des temps anciens, que d’en appeler au sursaut civique, à la permanence des valeurs et au devoir. On en crève de tout relativiser, de tout accepter et au fond de lâcher prise. Croire en la France, c’est voter ! Et c’est faire voter également. Notre pays n’est pas foutu. Il a en lui des trésors d’imagination, de solidarité, d’initiatives, d’entreprises, de territoires, de femmes et d’hommes qui ont envie d’agir non pas seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour lui. Ce message, cette volonté-là, il faut les valoriser, les diffuser, les défendre, y compris et surtout à portée d’engueulade et de convictions. Il faut parler avec passion de la France, de ce qu’elle signifie et de ce qu’elle doit être, et ses régions et départements avec elle. Il faut lutter dans le débat et par le vote contre ceux qui font leur pelote sur le malheur, la débine, la déprime collective et désormais le complotisme aussi. L’avenir ne s’écrit pas en vitupérant à longueur de temps, en pointant du doigt, qui la diversité de la France, qui les journalistes. Il s’écrit en participant, en proposant, en construisant, en fédérant. Il y en a assez du pessimisme ambiant et de la morosité. Il est temps d’avoir envie, de s’intéresser et de voter parce qu’être français, c’est d’abord cela.
Croire en la France, c’est voter !
Dans quelques jours auront lieu les élections régionales et cantonales. La campagne avance. Passionne-t-elle, mobilise-t-elle ? Rien n’est moins sûr. Déjà, certains commentateurs affutent leurs arguments pour les plateaux de télévision dimanche prochain : l’abstention sera nécessairement forte et il s’agira, comme d’habitude, de la déplorer, en y ajoutant les quelques trémolos qu’il faut pour justifier sa présence sur les dits plateaux. Tout cela n’est pas joyeux et sent allègrement le réchauffé. Des soirées électorales tristounettes et sans ressort, on en a connu. Est-ce que les Français s’en fichent vraiment des élections et de leur devoir civique ? On ne le saura que dimanche à 20 heures, lorsque fermeront les bureaux de vote. Tirer les conclusions d’un évènement avant même qu’il ait eu lieu est hasardeux. Une chose est sûre cependant : le débat politique français est sinistre et passe totalement à côté des enjeux des deux scrutins. La vacuité des idées est affolante. Il n’est question que de postures, de divisions, de calculs abscons et d’obsession présidentielle. Le tout sur fond de haine et de violence libérée, alimentée par quelques « youtubeurs » frappadingues et divers autres « contributeurs » en forme olympique, courageusement planqués derrière des pseudonymes sur les réseaux sociaux.
C’est à pleurer. On nous dira que c’est l’époque, que les gens ont tant souffert depuis mars 2020 que l’envie de vivre est plus forte, que c’est le printemps et même bientôt l’été et qu’en plus il y a l’Euro de foot. C’est juste en effet, à part que cela n’empêche pas non plus d’aller voter. Il n’y a aucune fatalité à ce que l’on s’abstienne et que le débat politique soit moche. Il faut pour cela vouloir élever le niveau, parler de ces élections plutôt que de celle d’après, ne pas céder à la confusion ambiante et encore moins y contribuer par des propos hors sujet. Nous traversons une crise économique et sociale gravissime, liée à une pandémie meurtrière, la pire depuis un siècle. Et quelles sont les responsabilités des régions et départements ? L’économie, l’aménagement du territoire et la formation pour les unes, le social pour les autres. C’est dire combien ces collectivités seront centrales dans la reconstruction à mener pour l’après-Covid. Or, tous les projets et propositions sur ces fronts ne se valent pas. Il y a des différences, des perspectives alternatives conséquentes entre les listes qui se présentent à nos suffrages. C’est de cela dont il faut parler : l’emploi, le modèle économique et le développement durable, pas les questions identitaires sur lesquelles les régions n’ont aucune prise ni compétence.
Français à l’étranger, sans doute ai-je le regard spontanément tourné vers les débats et rendez-vous électoraux des pays amis et partenaires. Je ne vois nulle part ailleurs la même atmosphère délétère, mais aussi le même atavisme et la même résignation qu’en France. L’idée que « c’est comme cela » et qu’on n’y pourrait rien, elle est chez nous seulement et elle me consterne. Il est temps d’en prendre conscience au-delà des microcosmes partisans et du boulevard périphérique de Paris. Lorsqu’en France, face à la difficulté d’organisation des élections en temps de pandémie, la réaction immédiate est de les repousser, elle est au contraire ailleurs d’amender les règles de droit électoral pour encourager la participation. Cela dit tout. En mars dernier, les élections aux Pays-Bas ont vu la plus large participation électorale. Ce fut le cas en mai aussi pour les élections au parlement régional de Madrid. Pourquoi ce qui est possible là-bas ne le serait pas chez nous ? Pourquoi ériger en totem notre droit électoral et chercher toutes les raisons possibles de rejeter le vote anticipé, utilement pratiqué dans d’autres pays ? Il faut vouloir oser, arrêter de calculer et de jouer petit bras tant est grand le risque d’envoyer la démocratie au fossé en vivant avec les peurs ou en les alimentant.
Il faut voter. La citoyenneté n’est pas faite que de droits, elle est aussi faite de devoirs et voter est un devoir civique. Quel est le sens de se plaindre de tout et de ne pas voter ? Je suis choqué d’entendre des gens affirmer ne pas voter parce que cela ne leur apporterait rien à eux, individuellement. Cet utilitarisme est une déconstruction affligeante du civisme. C’est une honte au regard de l’histoire de notre pays, de ses combats et de ses épreuves. Nous ne sommes pas une collection d’individus, pour certains altruistes (heureusement) et pour d’autres égoïstes (tristement). Nous sommes un peuple, une nation, un pays face à son destin. La citation est connue et elle concernait une autre histoire que la nôtre, mais ce qu’affirmait le Président John F. Kennedy dans son discours inaugural à Washington en janvier 1961 est plutôt universel : « (…) Ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ». Je revois ma grand-mère aller voter jusqu’au soir de sa vie, fière et consciente de son devoir. Je la revois aussi, lorsque ses pas ne la portaient plus jusqu’au bureau de vote, remplir dûment sa procuration pour que sa voix soit exprimée, parce qu’elle y tenait plus que tout. Ce souvenir m’a marqué à jamais comme petit-fils et citoyen.
Ce n’est pas être un vieux con, porté par la nostalgie ou la mémoire des temps anciens, que d’en appeler au sursaut civique, à la permanence des valeurs et au devoir. On en crève de tout relativiser, de tout accepter et au fond de lâcher prise. Croire en la France, c’est voter ! Et c’est faire voter également. Notre pays n’est pas foutu. Il a en lui des trésors d’imagination, de solidarité, d’initiatives, d’entreprises, de territoires, de femmes et d’hommes qui ont envie d’agir non pas seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour lui. Ce message, cette volonté-là, il faut les valoriser, les diffuser, les défendre, y compris et surtout à portée d’engueulade et de convictions. Il faut parler avec passion de la France, de ce qu’elle signifie et de ce qu’elle doit être, et ses régions et départements avec elle. Il faut lutter dans le débat et par le vote contre ceux qui font leur pelote sur le malheur, la débine, la déprime collective et désormais le complotisme aussi. L’avenir ne s’écrit pas en vitupérant à longueur de temps, en pointant du doigt, qui la diversité de la France, qui les journalistes. Il s’écrit en participant, en proposant, en construisant, en fédérant. Il y en a assez du pessimisme ambiant et de la morosité. Il est temps d’avoir envie, de s’intéresser et de voter parce qu’être français, c’est d’abord cela.