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J’ai participé dimanche dernier à la commémoration du soixante-huitième anniversaire de la libération du camp de Mauthausen en Autriche. J’ai traversé cette journée avec une grande émotion.
Je tiens à ce que le devoir de mémoire fonde l’exercice de mon mandat de Député d’Europe centrale.
Voici le texte du discours prononcé devant le Monument français érigé dans l’enceinte du camp :
Monsieur l’Ambassadeur,
Monsieur le député, cher Yves Censi,
Chers enfants, chers compatriotes,
C’est avec honneur, humilité et une immense émotion que je prononce ces quelques mots au pied du monument à la mémoire des milliers de déportés français disparus à Mauthausen.
Je suis un Français de l’étranger, un Français amoureux de l’Europe, de sa diversité, de ses cultures. Je suis, comme tous ceux de ma génération, le produit de la paix, de la réconciliation et des droits de l’homme. Je suis aussi un parlementaire, député élu par mes compatriotes vivant dans 16 pays d’Europe centrale, parmi lesquels l’Autriche, l’Allemagne et la Pologne. C’est dans ma circonscription que se trouvaient la majorité des camps de concentration et d’extermination de la Seconde Guerre Mondiale.
Dès mon élection à l’Assemblée nationale en 2012, je me suis promis d’assister chaque année à l’une des commémorations organisées par les amicales de déportés pour rendre hommage aux femmes, hommes et enfants qui ont vécu l’enfer des camps. Cet hommage est universel. Il est notre devoir. Il est mon devoir. J’étais il y a deux semaines dans la maison des enfants d’Izieu. J’en suis revenu bouleversé. Je le suis tout autant aujourd’hui.
Sur la plaque apposée au monument derrière moi, l’on peut lire : « A l’Autriche libérée, la France confie ses morts ». Que ce soit dans ce camp, dans la carrière Wienergraben au-dessous de cette esplanade ou dans celle de Gusen, dans les caves de la brasserie Zipfer ou dans les galeries creusées par les déportés à Ebensee, des Français sont morts, loin de leur pays et de leur famille. Victimes de la pire entreprise humaine qui ait un jour existé.
Dix ans après la libération de Mauthausen, des exhumations ont été opérées afin de donner un nom aux êtres ensevelis dans des fosses communes. Dès janvier 1956, un premier convoi de dépouilles a pu être rapatrié en France. Pour les familles dont l’identification a été impossible ou pour les déportés incinérés ici, à Gusen, à Ebensee ou à Hartheim, la seule manière d’honorer la mémoire des victimes est de se déplacer en Autriche.
Nous sommes tous là ce dimanche 12 mai pour rendre hommage aux victimes de Mauthausen. Nos pensées sont pour elles. Voilà bientôt 70 ans que d’anciens déportés sillonnent la France pour faire connaître aux écoliers leur terrible expérience. Certains font encore le voyage en Autriche et sont présents avec nous aujourd’hui. Leur courage, leur obstination, leur combat pour la cause de la paix et la lutte universelle contre tous les génocides forcent notre admiration et notre éternelle reconnaissance.
Plus jamais cela. Il ne doit y avoir ni haine, ni oubli. J’ai repensé ces derniers jours à la chanson Nuit et Brouillard qu’interprétait Jean Ferrat avec tant de force. J’ai à l’esprit ces paroles :
On me dit à présent que ces mots n’ont plus cours
Qu’il vaut mieux ne chanter que des chansons d’amour
Que le sang sèche vite en entrant dans l’histoire
Et qu’il ne sert à rien de prendre une guitare
Mais qui donc est de taille à pouvoir m’arrêter?
L’ombre s’est faite humaine, aujourd’hui c’est l’été
Je twisterais les mots s’il fallait les twister
Pour qu’un jour les enfants sachent qui vous étiez.
Dans quelques jours, vous tous, enfants qui nous entourez, rentrerez en France. Ce moment, j’en suis certain, vous marquera à jamais. Compatriotes, tombés à Mauthausen, déportés qui portez la torche de la vérité, sachez que ces enfants, avec nous, savent pour toujours qui vous étiez.
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