La session d’avril de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) s’est achevée ce vendredi. J’ai participé à l’ensemble de ses débats à l’exception de ceux de mardi, jour du discours de politique générale du nouveau Premier Ministre Manuel Valls et du vote de confiance à l’Assemblée nationale. Avec la plupart des autres députés de la délégation française, j’avais alors fait l’aller-retour entre Strasbourg et Paris. C’est peu dire que cette session d’avril de l’APCE aura été intense, si ce n’est même tendue. Le contexte y contribuait, avec la situation en Ukraine et l’annexion de la Crimée par la Fédération de Russie. Entre mercredi et jeudi, ce sujet aura été au centre de débats très houleux entre parlementaires. Mais il y avait également d’autres questions importantes à l’ordre du jour de la session, notamment sur l’accès à la nationalité, l’apatridie, la protection des mineurs contre les dérives sectaires ou bien le soutien aux minorités dites « traditionnelles ».
A une très forte majorité hier, en réaction à l’annexion de la Crimée, nous avons voté en faveur de la suspension des droits de vote de la délégation russe. Cette suspension, qui court jusqu’à la fin de l’année 2014, s’accompagne d’une interdiction faite aux parlementaires russes de participer aux réunions des organes dirigeants de l’APCE et aux missions d’observation des élections. Cela signifie, entre autres, que les parlementaires russes ne pourront pas prendre part à l’élection du Secrétaire-Général du Conseil de l’Europe au mois de juin prochain. A titre personnel, sans aller jusqu’à l’exclusion pure et simple des parlementaires russes, j’aurais souhaité que la liste des sanctions votées soit plus longue, mais je comprenais aussi qu’il était nécessaire de dégager une large majorité sur la condamnation des initiatives russes en Ukraine. Je rends hommage au travail réalisé par le rapporteur Stefan Schennach, député social-démocrate autrichien, pour construire cette majorité.
En tout état de cause, je ne concevais pas que cette session de l’APCE se déroule sans que des mesures soient prises en réaction au coup de force russe. J’entends bien que l’une des vertus du Conseil de l’Europe et notamment de son Assemblée Parlementaire soit à raison le dialogue, mais le maintien de celui-ci ne pouvait justifier une réaction empreinte de faiblesse, voire pas de réaction du tout. J’estime que l’APCE se serait déconsidérée si elle s’en était tenue à de seuls regrets et à l’inaction. C’est en substance ce que j’avais dit lors de la réunion préparatoire de la délégation française le dimanche 6 avril. Le cynisme de Vladimir Poutine et son mépris pour le droit international ainsi que pour les engagements consentis par la Russie au moment de son adhésion au Conseil de l’Europe m’insupportent. C’est ce que je me suis attaché à exprimer dans l’intervention que j’ai faite dans l’Hémicycle sur la situation en Ukraine mercredi après-midi. Le texte de cette intervention est en pièce jointe. En voici aussi la vidéo.
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L’orateur inscrit avant ma prise de parole était un député d’extrême-droite hongrois, qui avait bruyamment applaudi à l’annexion de la Crimée et demandé que son pays en fasse de même avec la Transcarpathie, région occidentale de l’Ukraine où vit une minorité hongroise. De telles revendications soulignent combien il y a péril à relativiser, voire remettre en cause l’intangibilité des frontières. Le nationalisme prospère dangereusement dans certains pays et certains milieux. Un rapport sur les droits des minorités « traditionnelles », présenté par un député hongrois du parti du Premier Ministre Viktor Orban, a ainsi été quasiment réécrit par amendements en séance plénière mardi tant sa mouture initiale alimentait et justifiait d’éventuelles visées expansionnistes. Dans le même Hémicycle du Palais de l’Europe, François Mitterrand avait dit dans l’un de ses derniers discours en 1994 : « le nationalisme, c’est la guerre ». Puissions-nous nous en souvenir avec suffisamment de force pour combattre toutes les dérives et atteintes à l’Etat de droit que la période nourrit.
Outre le débat sur l’Ukraine, je suis intervenu à deux autres reprises en séance plénière dans le courant de la semaine. J’ai été l’orateur du groupe socialiste dans le débat de mercredi soir sur l’accès à la nationalité et la mise en œuvre effective de la Convention européenne sur la nationalité. Le rapporteur était le député socialiste letton Boriss Cilevics. J’ai souligné l’urgence qu’il y a à s’attaquer à l’apatridie, qui touche près de 700 000 personnes en Europe, parmi lesquelles beaucoup d’enfants, faisant d’eux des citoyens de seconde zone privés de droits. J’ai également plaidé en faveur de la plurinationalité, que je vois comme la conséquence heureuse du mouvement entre nos peuples et en aucune manière une menace. A l’occasion du débat libre de lundi, j’avais pris la parole sur les conflits d’autorité parentale dans le cadre transnational, demandant qu’un travail européen sur la définition de l’intérêt supérieur de l’enfant soit conduit. Cette intervention ouvre la voie à l’engagement de la commission des affaires juridiques de l’APCE sur ce sujet douloureux. Les textes de ces deux interventions se trouvent en pièces jointes. En voici les vidéos.
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Avec Marietta Karamanli, députée PS de la Sarthe, et Jean-Pierre Michel, sénateur PS de la Haute-Saône, j’ai prêté main forte à notre collègue Rudy Salles, député UDI des Alpes-Maritimes, afin que son rapport sur la protection des mineurs contre les dérives sectaires survive à l’assaut d’une coalition conservatrice en commission des affaires juridiques. Il était fait injustement procès au travail de Rudy Salles de menacer la liberté religieuse. Dans les jours précédant le débat, certaines sectes nous avaient adressé des courriers appelant au rejet du rapport de Rudy Salles. Les débats auront été serrés, la plupart des votes importants se jouant à une seule voix de majorité. C’est dire que notre mobilisation à trois députés socialistes français aura été déterminante pour que soit adopté ce rapport, qui propose notamment aux Etats membres du Conseil de l’Europe de créer des centres nationaux de surveillance du phénomène sectaire, de contrôler les établissements scolaires privés et de pénaliser l’abus de faiblesse.
Enfin, et cela nourrira mon activité à l’APCE dans les prochains mois, j’ai été désigné rapporteur sur les réseaux culturels et d’éducation des communautés à l’étranger par la commission de la culture, de l’enseignement et des médias. C’est un rapport que je préparerai avec soin, m’inspirant de notre expérience française à l’étranger et travaillant en direct, avec le soutien des administrateurs de l’APCE, auprès des parlements et gouvernements des autres 46 Etats membres du Conseil de l’Europe. J’espère être en mesure de présenter ce rapport en commission, puis en séance plénière sous un an. Mes prochains rendez-vous à l’APCE seront les 22-26 mai en Ukraine (observation de l’élection présidentielle) et les 23-27 juin à Strasbourg (session plénière de juin).
APCE avril divorces : conflits d’autorité parentale.
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