Je me suis rendu à Timisoara les 2-3 juillet derniers. J’avais promis de longue date à Daniel Malbert, directeur de l’Institut français, auparavant en poste à l’Institut français de Cologne, de faire ce déplacement. Je ne connaissais pas encore cette partie de la Roumanie, proche de la Serbie et de la Hongrie. Près de 200 Français y vivent. Le nom de Timisoara, belle ville multiculturelle de 320 000 habitants, évoquait d’abord pour moi les évènements de la libération de la Roumanie du communisme en décembre 1989. Evènements auxquels j’ai pensé, non sans émotion, en visitant le Lycée Jean-Louis Calderon et sa filière bilingue francophone. Jean-Louis Calderon, grand reporter pour la Cinq, avait été l’une des victimes des évènements de décembre 1989, écrasé par un char dans une rue de Bucarest alors qu’il accomplissait son travail de journaliste. Sa disparition tragique m’avait marqué. Elle avait suscité une vive émotion dans notre pays ainsi, bien sûr, que dans la Roumanie libérée.
L’Institut français de Timisoara est ouvert depuis 1991. Durant ces quelque 25 années, il a formé au français une grande partie des élites locales. Installé près du centre-ville, l’Institut a développé une grande proximité avec les autorités locales. Sa notoriété est réelle et contribue sans nul doute à l’offre culturelle et artistique de la ville. L’engagement de l’Institut autour du cinéma en est une illustration. Timisoara est en effet une ville très cinéphile, qui compta à une époque pas moins de 30 cinémas. J’ai été impressionné également par le travail effectué par Daniel Malbert et son équipe auprès du jeune public et des familles. J’ai pu assister avec plaisir avec les familles à la présentation des petits films réalisés par les enfants fréquentant en ce début juillet le club de vacances mis en place par l’Institut. Nombre de partenaires de l’Institut offrent une réduction sur la carte d’accès à la médiathèque. Un pass commun a par ailleurs été développé avec le centre culturel allemand.
L’Institut français compte près de 1 000 apprenants. Son activité s’étend au-delà de Timisoara pour embrasser plus largement le sud-ouest roumain. Trois centres décentralisés ont ainsi été ouverts récemment pour l’examen du DELF. C’est un défi de faire rayonner notre langue et notre culture dans un contexte moins favorable qu’auparavant, le français reculant dans l’enseignement public roumain face à la concurrence de l’allemand, l’espagnol et l’italien. La promotion du DELF est stratégique face à cette évolution. Il faudrait pouvoir relancer les moyens à consacrer à la formation continue des professeurs de français en Roumanie. Le travail en partenariat avec les établissements scolaires locaux est très précieux. J’ai pu m’en apercevoir au Lycée Jean-Louis Calderon, qui scolarise 569 élèves dans sa filière bilingue. La géographie de la France, l’histoire de France, la biologie et l’histoire sont les disciplines non-linguistiques qui y sont enseignées en français.
Ne faudrait-il pas, au regard du succès des filières bilingues francophones, promouvoir l’idée d’un baccalauréat franco-roumain ? Ou tendre à tout le moins au renforcement du poids du baccalauréat bilingue actuel ? Les lycéens et leurs parents souhaiteraient qu’un diplôme français puisse être délivré à la fin des études, à l’instar par exemple de ce qui se pratique avec l’enseignement bilingue hispanophone, où les lycéens de Roumanie reçoivent un diplôme espagnol délivré par le Ministère de l’Education à Madrid. Cela faciliterait l’inscription dans les universités à l’étranger. L’accès, l’an prochain, au Label France Education sera déjà un pas important dans cette perspective. Cela permettra à davantage de futurs bacheliers de suivre les pas de quelques anciens élèves sur le campus dijonnais de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris. Le dévouement et la passion des enseignants du Lycée Jean-Louis Calderon m’auront en tous les cas beaucoup touché.
A l’Institut français, en marge de ma réunion publique de compte-rendu de mandat, j’ai reçu un étudiant français en médecine à l’Université de Timisoara. Une centaine de jeunes compatriotes étudient les matières médicales à Timisoara et Arad, ville située à une relative proximité. J’ai pu présenter à cet étudiant le travail engagé à Cluj, qui vise à lever toutes les discriminations de droit ou de fait qui demeurent pour se présenter au concours de l’internat. J’ai rencontré à l’Université de Timisoara le Recteur Marius Raica et plusieurs professeurs de la section française. Cette section existe depuis 3 ans en médecine et en pharmacie. Le souhait de l’Université de Timisoara est de développer davantage de relations avec des universités françaises. J’ai assuré le Recteur que je m’en ferais l’écho à mon retour à Paris. De ces échanges en effet dépendent beaucoup la considération et la reconnaissance nécessaires tant à l’Université qu’aux étudiants eux-mêmes dans la perspective de leur projet professionnel. Les études longues à l’étranger doivent être valorisées et reconnues.
Le dynamisme économique de Timisoara m’a impressionné. La ville compte un taux de chômage de 1%. Plus de 10 000 personnes travaillent dans le secteur des technologies de l’information. Le développement des technologies de l’information en Roumanie, au-delà d’une flat tax de 16% pour tout le monde, tient notamment à l’absence d’imposition pour les développeurs offrant des produits finis. Timisoara et sa région bénéficient en outre de leur proximité avec le centre de l’Europe. L’on va bien plus vite à Vienne, Budapest ou Belgrade depuis Timisoara qu’à Bucarest. J’ai rencontré plusieurs compatriotes actifs dans la communauté d’affaires franco-roumaines, dont Cosmin Brazan, directeur du centre d’appels mis en place par Helpline il y a 2 ans et qui compte déjà plus de 100 salariés. Monsieur Brazan est également depuis peu le Consul honoraire de France. L’agence consulaire est ouverte au City Business Center. J’ai pu également m’entretenir avec les représentants de Continental, Auchan et Décathlon.
Merci à Daniel Malbert, à sa compagne Anouk Lederlé et à Guillaume Dujardin, chargé de coopération éducative à l’Institut français et enseignant à l’Université de Timisoara, pour la gentillesse de leur accueil.
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