Le gouvernement avance sur la définition du mécanisme de remboursement de la CSG et de la CRDS aux contribuables non-résidents, ainsi que l’arrêt de Ruyter de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) du 26 février dernier lui en fait obligation. Le travail engagé par Bercy comporte des aspects positifs, qu’il faut cependant lire en parallèle avec d’autres développements bien moins encourageants annoncés ce matin à l’occasion de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.
Les prélèvements opérés en 2013, 2014 et 2015 seraient remboursés à tous les contribuables non-résidents concernés qui en feront la demande auprès de la Direction générale des finances publiques (en l’occurrence, le service des impôts des particuliers non-résidents) en produisant à cette fin les actes d’imposition et en apportant la preuve de leur affiliation au régime de sécurité sociale de leur pays de résidence. Les sommes payées leur seraient intégralement restituées, majorées du taux d’intérêt légal. Une communication imminente du gouvernement précisera les règles de remboursement.
Deux limites seraient apportées au principe du remboursement : il ne s’adresserait qu’aux contribuables non-résidents établis dans l’Union européenne ainsi qu’en Suisse, Liechtenstein, Norvège et Islande, et exclurait l’année 2012 en vertu des règles de prescription. Je suis en désaccord avec ces deux limites. Ne rembourser qu’une partie des non-résidents conduirait à une rupture d’égalité devant les charges publiques. Ne pas prendre en compte l’année 2012 pénaliserait les contribuables qui, à défaut d’information, n’avaient pu introduire de réclamation à temps avant le 31 décembre 2014.
Pour l’avenir, le gouvernement entend maintenir la CSG et la CRDS sur les non-résidents en affectant cette recette au Fonds de solidarité vieillesse plutôt qu’au régime général de la Sécurité sociale. Il estime que l’affectation à des prestations non-contributives comme le Fonds de solidarité vieillesse lui permettrait de respecter l’arrêt de Ruyter. Je suis là aussi en désaccord. Le principe d’unicité de législation sociale consacré par le droit européen s’applique à toutes les législations nationales relatives aux branches vieillesse. Le fait que les prestations soient contributives ou pas est inopérant. Il est indéniable par ailleurs que la CSG finance globalement un régime obligatoire de sécurité sociale.
Je regrette le choix d’une telle option, qui place la France de nouveau en rupture avec le droit européen et pourrait générer un contentieux susceptible de coûter très cher aux finances publiques, bien au-delà des 500 millions d’Euros provisionnés pour le remboursement des non-résidents au terme de l’arrêt de Ruyter. J’interviendrai dans le débat budgétaire en faveur du remboursement de tous les non-résidents, en Europe comme hors d’Europe, pour la prise en compte de l’année 2012 et contre le maintien d’un prélèvement dont le changement d’affectation de la recette n’enlève rien à son incompatibilité avec le droit européen.
Il faut rappeler en tout état de cause que la procédure d’infraction engagée en 2013 par la Commission européenne contre la France suite au prélèvement de la CSG et de la CRDS sur les revenus immobiliers des non-résidents est toujours en cours. La Commission a adressé le 18 juin dernier une lettre de mise en demeure à la France, à laquelle aucune réponse n’a été apportée dans le délai imparti. Nul doute que la Commission examinera précisément si l’affectation nouvelle de la recette de la CSG et de la CRDS concernant les non-résidents respecte l’arrêt de Ruyter. Si elle s’estimait non-convaincue, c’est une autre instance devant la CJUE qui s’engagerait alors.
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