Suite à la présentation le 20 octobre par le gouvernement du mécanisme de remboursement des prélèvements sociaux opérés à tort sur les revenus immobiliers des non-résidents, j’avais interrogé l’administration fiscale sur une série d’interrogations restées sans réponse dans la communication de Bercy. Voici ces interrogations et les réponses que je viens de recevoir :
1 : Les personnes affiliées à la Caisse des Français de l’Etranger (CFE) peuvent-elles bénéficier du remboursement ?
Oui, à condition que ces personnes soient par ailleurs également affiliées à titre obligatoire à un régime de sécurité sociale de l’un des Etats membres de l’Espace économique européen ou en Suisse. Non dans tous les autres cas.
2 : Quels documents peuvent être produits pour établir leur affiliation par les personnes cotisant à titre obligatoire auprès d’une sécurité sociale privée (comme en Allemagne, par exemple) ?
De préférence, des documents justificatifs « normés » dûment complétés par l’autorité compétente de l’Etat d’affiliation. Cependant, tout autre élément de preuve de l’affiliation pourra être également pris en compte.
3 : Faut-il fournir une traduction des documents justificatifs ?
Oui, si les documents ne sont pas « normés ». En cas de difficulté quant à la compréhension de documents rédigés en langue étrangère, l’administration fiscale pourra écarter les documents présentés à l’appui de la réclamation et prononcer le rejet de la demande de remboursement.
4 : Les personnes affiliées au régime de sécurité sociale d’une organisation européenne sont-elles éligibles au remboursement ?
Non, car les régimes sociaux des organisations européennes ne sont pas inclus dans la coordination européenne des mécanismes européens de sécurité sociale prévue par les Règlements n°1408/71 et 883/04.
5 : Les personnes ayant le statut de résident fiscal en France et de résident administratif dans un pays de l’Espace économique européen ou en Suisse peuvent-elles bénéficier du remboursement ?
Le seul critère pertinent pour déterminer l’éligibilité au remboursement est l’affiliation au système de sécurité sociale d’un pays de l’Espace économique européen ou de Suisse.
6 : Parmi les documents à fournir, est-il utile de joindre une copie du livret de famille et de l’acte de propriété ?
Oui, car le régime matrimonial des époux, ainsi que les stipulations du contrat de PACS, de même que l’acte de propriété du bien loué ou cédé en cause, ont une incidence sur la détermination du titulaire des revenus du capital réalisés au sein de la famille.
7 : Comment s’opérera le remboursement lorsque le bien est détenu en indivision et que le couple est, pour l’un affilié en France, pour l’autre à l’étranger ?
L’assiette des dégrèvements sera limitée aux droits détenus dans le bien par celle ou celui qui, dans le couple, est affilié à l’étranger.
8 : Est-il nécessaire de faire le versement de l’impôt dû au titre de l’année 2014, dont l’échéance arrive en novembre, et d’introduire ensuite une réclamation pour récupérer les sommes versées ?
Il est possible, à l’appui de la demande de réclamation, d’introduire une demande de sursis de paiement.
Je suis consterné par la réponse qui m’a été faite sur la non-éligibilité des personnels des organisations européennes au remboursement des prélèvements sociaux. S’il est clair que les régimes de sécurité sociale des organisations européennes ne sont pas inclus en effet dans les Règlements n°1408/71 et n°883/04, il n’en reste pas moins que les personnels concernés sont des travailleurs migrants au sens de l’article 45 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et doivent par conséquent se voir reconnaître le bénéfice des principes d’unicité de législation sociale et de non-discrimination. La décision du gouvernement de les priver de remboursement est éminemment contestable juridiquement et donnera lieu sans aucun doute à un contentieux.
Je déplore également l’obligation de facto de fournir des traductions de documents établissant l’affiliation au régime de sécurité sociale de l’Etat de résidence lorsque ces documents ne sont pas « normés ». Cela fait peser un coût inacceptable sur les personnes concernées, réduisant finalement le remboursement auxquelles elles ont le droit. Cette exigence me semble en rupture avec la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne sur la répétition de l’indu et peut, là aussi, conduire à un contentieux. Sur les traductions comme sur la décision de ne pas rembourser les personnels des organisations européennes, j’ai saisi en urgence le Secrétaire d’Etat au Budget.
J’ai écrit ce lundi à la Commissaire européenne aux Affaires sociales Marianne Thyssen pour lui demander audience afin de plaider en faveur du respect du droit européen de la sécurité sociale. Je porterai en seconde lecture les 23-24 novembre le même amendement qu’en première lecture visant à supprimer le prélèvement de la CSG et de la CRDS sur les revenus immobiliers des non-résidents. Le débat qui s’engage au Sénat cette semaine conduira, je l’espère, au vote d’un amendement en ce sens.
Je suis heureux d’avoir appris ce soir que le gouvernement aurait décidé finalement de rembourser les prélèvements sociaux acquittés au titre de l’année 2012. Comme quoi la mobilisation et la pression paient, même tardivement. Prolongeons-la pour l’avenir afin de prévenir une autre violation du droit européen à travers la réaffectation des recettes de la CSG et de la CRDS vers des prestations sociales non-contributives, imaginée à tort comme permettant d’ignorer l’arrêt de Ruyter.
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