Comme de nombreux Français, j’ai suivi la conférence de presse du Président de la République le 25 avril. J’ai été séduit par diverses initiatives et mesures annoncées, mais je suis aussi resté clairement sur ma faim concernant la transition écologique. Disons-le franchement : à ce stade (et depuis 2 ans), le compte n’y est pas. Il y a un écart regrettable, coupable même, entre l’ambition internationale régulièrement affichée par la France sur le climat et la réalité décevante des résultats obtenus dans l’hexagone. Depuis 2015, les émissions de gaz à effet de serre sont reparties à la hausse, en flagrante contradiction avec notre stratégie nationale bas carbone, et les prévisions indiquent qu’elles pourraient continuer à augmenter ainsi jusque 2023.
A un moment – et ce moment, la jeunesse qui défile dans les villes de France nous rappelle que c’est maintenant – il faut avoir le courage et l’ambition d’aligner les professions de foi, les actes et les résultats. Un jury de 150 citoyens tirés au sort va travailler sur la question et faire des propositions. Très bien, mais n’était-ce déjà pas le rôle du grand débat national ? Une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne et un prix minimal du carbone dans l’Union ont été mentionnés. Très bien également, mais outre qu’il faut pour cela une unanimité des 28, ceci ne peut nous dédouaner de l’obligation d’agir en France. Or, rien n’a été dit sur l’avenir de la fiscalité française du carbone et la redistribution nécessaire de ses recettes, à l’origine pourtant du mouvement des Gilets jaunes.
La France inscrira prochainement dans la loi l’objectif de neutralité carbone pour 2050, que l’on atteindra en divisant par six les émissions de gaz à effet de serre. Il y aura certes toujours des émissions résiduelles de gaz à effet de serre, mais elles devront compensées par des puits de carbone naturels comme les forêts ou les zones humides et peut-être aussi par la capture et la séquestration du CO2. Comment ne pas soutenir cet objectif ? Et comment ne pas mesurer en même temps que des choix devront être faits pour que les résultats soient au rendez-vous ? A commencer par des choix profonds, structurants, irréversibles d’aménagement du territoire, alors même que la France est soumise à une artificialisation accélérée des terres.
Choisir, agir, obtenir des résultats, là est tout le défi pour notre pays. Cela fait des années, depuis le Grenelle de l’environnement, que la transition écologique est sujette aux effets d’annonce sans grand lendemain et in fine à une procrastination coupable. L’objectif de neutralité carbone voudrait que l’on aborde de front la question de l’affectation des terres : quelle part à la plantation d’arbres, quelle part à la production agricole, quelle part au développement économique, quelle part aussi aux grands parcs solaires ? Si ce travail-là n’est pas fait et les décisions prises peu ou pas exécutées (autre réalité dérangeante), l’objectif, comme les précédents, ne sera pas davantage tenu. Rien ne sera durable non plus sans investissements massifs pour la diversification énergétique, l’isolation thermique et l’évolution de l’agriculture.
On ne peut indéfiniment jouer petit bras et créer des instances supplémentaires de débat alors que l’urgence d’agir est là. Un conseil de défense écologique sera institué au sein du gouvernement. Qu’apportera-t-il à l’action ? Et pour dire les choses abruptement, s’imposera-t-il aux opérateurs historiques de l’énergie en France ? Ou en resterons-nous à « business as usual », c’est-à-dire au surplace ? Le Parlement osera-t-il prendre toute sa place – il le devrait – en inscrivant dans la loi et en particulier dans le budget une fiscalité ambitieuse du carbone qui soit puissamment incitative et en même temps juste socialement ? Contrôlera-t-il l’action de l’exécutif, demandera-t-il des comptes, autant sur l’EPR de Flamanville que sur les parcs éoliens offshore annoncés depuis si longtemps et que l’on attend toujours ?
C’est en affichant des résultats et pas seulement des objectifs que la France exercera utilement le leadership qui lui revient dans le combat global contre le réchauffement climatique. L’Accord de Paris nous oblige. Symboliquement, parce que la France a été le pays hôte de la COP 21, elle en est le garant. Des débats importants interviendront après les élections européennes et le renouvellement de la Commission cet automne. Ils porteront notamment sur la neutralité carbone à l’échelle de l’Union, dans un contexte de division entre Etats allants et Etats réfractaires, et sur les perspectives financières pluriannuelles de l’Union pour la période 2012-2027. Dans cette négociation essentielle, il faudra aller chercher plus de crédits pour la transition écologique. Autant de sujets pour lesquels la France sera attendue, à condition d’être au clair sur la transition écologique chez elle.
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Le bonheur de courir
A plus de 50 ans, je n’ai plus les jambes de ma jeunesse. L’âge est là, mais ce n’est pas tragique. Parce que dans ma jeunesse, je courais beaucoup moins qu’aujourd’hui. Sans doute le jogging était-il moins populaire qu’il ne l’est devenu désormais. Et je passais beaucoup de temps sur mon vélo, de sorte que l’activité physique était garantie. Ce n’est qu’après la trentaine que je me suis mis à courir. Pour voir jusqu’où je pouvais aller et peut-être aussi, comme un rêve secret, imaginer que je pourrais m’aligner sur un semi-marathon. Je l’ai fait. Mais, au-delà de tout cela, c’est une inquiétude de santé qui m’a conduit sur les chemins des bois et forêts de Bruxelles. Depuis le début de l’adolescence, je souffre en effet d’un asthme qui, sans être trop préoccupant, gâchait une part de mes printemps, lorsque vient la floraison. Plutôt que de fuir le sport par précaution, alors qu’il fait partie de ma vie depuis l’enfance, je me suis dit que je devais au contraire en faire davantage et courir pour mieux maîtriser ma respiration. C’est rétrospectivement l’une de mes décisions les plus inspirées.
Aujourd’hui, si l’asthme ne m’a pas abandonné, il est moins menaçant. Et cela, je le dois à la course à pied. Je sais mieux comment respirer. La course me l’a appris, les conseils d’amis également. Courir est un bonheur, seul et plus encore en groupe. Je ne suis pas un athlète. Je connais mes limites et je sais que je n’ai pas les jambes pour un marathon. Je fais 5 ou 6 courses par an, souvent des semi-marathons, parfois aussi des courses de 10 km et 15 km. Je boucle les 21 km d’un semi-marathon en 2 heures les jours de bonne forme. J’aime échanger au départ et sur la route avec les concurrents, anonymes autant que je le suis. Cette joie collective et cette bonne humeur sont une belle part du bonheur de courir. C’est du sport pour tous, quel que soit l’âge. Avec parfois une œuvre à soutenir, comme le WWF pour lequel je cours tous les ans les 20 km de Bruxelles. « Move your … for nature » : l’an passé, c’était pour les éléphants, cette année pour le tigre. Mes enfants me voient partir le matin de la course, intrigués, surtout cette année avec les oreilles du panda. Au retour, ils attendent de voir la médaille.
Tout cela n’a rien du tout d’exceptionnel. Il faut faire du sport, chacun à sa manière, selon ses préférences, son âge et ses capacités. Le monde dans lequel nous vivons nous maintient bien trop longtemps sur des chaises, des fauteuils ou des canapés. Marcher, emprunter les escaliers plutôt que l’ascenseur, courir, pédaler, nager, c’est à la portée de bien des sportifs qui s’ignorent. On y gagne un bien-être, une meilleure hygiène de vie, du plaisir et souvent aussi de nouveaux amis. Sur le port de La Corogne, en Espagne, il y a une allée de 2 km sur laquelle j’aime chaque été aller courir pour gagner ensuite le « paseo maritimo », qui suit l’océan sur près de 10 km. Cette allée est connue des habitants de La Corogne comme « l’allée du cholestérol ». On y croise notamment ceux à qui la médecine a prescrit de l’exercice. Et qui se prennent au jeu, en marchant ou en courant. Mon beau-père médecin y retrouve encore certains de ses patients. C’est une chance d’avoir dans une ville des allées, des bois et des pistes pour courir. Toutes les villes n’ont pas cela. Ce devrait être un objectif de politique municipale, que l’Europe, parce que la saison est électorale, pourrait utilement encourager.
Voilà quelques idées et un petit témoignage au soir des 20 km de Bruxelles, une semaine après les 15 km de Woluwe-Saint-Lambert et deux semaines après les 10 km de Uccle. Je serai l’an prochain de nouveau au départ de ces 3 belles courses. D’ici là, je retrouverai les allées du Bois de la Cambre, le « paseo maritimo » de La Corogne et le front de mer de l’Ile Tudy. A l’automne, il y aura le semi-marathon de Bruxelles et, peut-être, celui de Lisbonne aussi (courir fait découvrir et aimer de belles villes!). Alors, vive le sport, vive le sport pour tous !
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